La crise ukrainienne et l’impact économique pour les épargnants et investisseurs

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L’invasion russe en Ukraine a horrifié le monde entier. Des millions de personnes ont fui et l’Europe est au bord d’un conflit majeur. Cette incertitude pèse également sur les marchés financiers. Et, bien qu’il n’y ait rien de plus précieux qu’une vie humaine, nous estimons que notre rôle est de vous informer correctement, en tant qu’épargnant ou investisseur auprès de notre banque, sur l’impact économique de cette crise.

Le week-end passé, l’Occident a annoncé une vague de sanctions économiques en vue d’exercer une forte pression sur Moscou. L’impact a été immédiat.

Le rouble russe s’est effondré de façon inédite et la bourse de Moscou est restée fermée par précaution (ce marché boursier est minuscule en regard des normes internationales et représente environ 0,3% du marché mondial des actions. La probabilité que votre portefeuille soit exposé aux actions russes est donc faible).

Même la sanction l’économique la plus lourde – l’exclusion de la Russie du système de paiement mondial SWIFT – a été approuvée contre toute attente. La Russie est par conséquent totalement isolée sur le plan économique, les flux financiers en provenance et à destination de la Russie s’assèchent.

Les prix de l’énergie atteignent des niveaux record

La Russie est un partenaire commercial important de l’Union européenne.

La Russie est un partenaire commercial important de l’Union européenne. Pas tant en volume, mais bien dans la nature des biens échangés. L’énergie, en premier lieu. 26% de l’approvisionnement en pétrole et 40% des importations de gaz à destination de l’Europe  proviennent de Russie. Tant le prix du pétrole que celui du gaz atteignent des records par crainte de perturber ces approvisionnements.

Ces dernières années, l’importance de l’énergie russe pour l’Europe n’a cessé de croître, et les alternatives à court et moyen terme sont quasi inexistantes (et quand elles existent, comme c’est le cas pour le gaz GNL qui peut être transporté par bateau, elles coûtent beaucoup plus cher).

Outre l’énergie, la Russie est également un important fournisseur de nombreuses autres matières premières

Pensez au titane (un métal indispensable, par exemple dans l’industrie aéronautique), la palladium, le néon (utilisé pour la production de semi-conducteurs) ainsi que des dizaines d’autres matières premières cruciales. La Russie est, avec l’Ukraine, le premier exportateur mondial de céréales (de nombreux pays du Moyen-Orient survivent grâce aux importations de céréales ukrainiennes et russes). Elle a aussi un rôle dominant dans le domaine des matières premières agricoles telles que le nitrate de potassium, un ingrédient indispensable aux engrais chimiques. La Russie, enfin,  est également un acteur important sur le marché du fret aérien. Suite aux sanctions et à la fermeture de l’espace aérien de nombreux pays européens, un grand nombre de chaînes logistiques risquent d’être encore plus gravement perturbées qu’elles ne le sont déjà.

Crise ukrainienne : quelles sont les conséquences économiques ?

1. L’inflation menace d’augmenter encore plus

Les sanctions annoncées isolent pratiquement complètement la Russie et frapperont durement le pays, ce qui augmente considérablement le risque de contre-sanctions. La Russie peut réduire ou arrêter la livraison de toutes les matières premières précitées. Même si nous n’en arrivons pas là, les perturbations (par exemple du trafic aérien) ne feront qu’exacerber les problèmes logistiques auxquels l’économie mondiale est confrontée. L’augmentation du prix du pétrole et du gaz – réaction prévisible à l’incertitude qui augmente – vient alimenter d’autres augmentations de prix.  

L’inflation, déjà élevée avant la crise ukrainienne (l’indice des prix à la consommation est désormais supérieur de 8,4 % à celui d’il y a un an), menace d’augmenter encore et de durer plus longtemps. Nous espérions être proches d’un « pic d’inflation » et d’une baisse progressive de certains prix (l’énergie, par exemple). Cet espoir s’est désormais envolé. Il s’agit là du premier effet secondaire économique important de la crise ukrainienne.

2. Les banques centrales sont en grande difficulté

Une deuxième conséquence : les banques centrales sont dans une position très difficile. L’une des tâches d’une banque centrale est de lutter contre une inflation élevée. Dans la zone euro, la Banque centrale européenne a jusqu’à présent toléré une inflation élevée pour ne pas ralentir la reprise économique fragile après la pandémie. Elle avait toutefois clairement indiqué que, d’ici la fin de l’année, une première hausse des taux d’intérêt était réaliste afin de ralentir l’inflation. La crise ukrainienne compromet cette perspective.

La guerre augmente le risque d’un choc de confiance qui pourrait affecter la croissance économique. Dans de telles conditions, une hausse des taux d’intérêt n’est pas évidente. Une économie touchée par un ralentissement de croissance nécessite au contraire un taux d’intérêt bas et des mesures de relance. La perspective que la BCE puisse être plus prudente concernant la hausse du taux d’intérêt est un nouvelle positive pour les marchés financiers. En effet, les investisseurs en actions et en obligations n’apprécient guère les taux d’intérêt élevés.

Cette situation met les épargnants et les investisseurs face à un choix difficile :

  • L’inflation, exacerbée par la crise ukrainienne, continue à éroder impitoyablement le pouvoir d’achat.
  • En même temps, la probabilité que la BCE lutte contre l’inflation diminue.
  • L’épargne est, plus que jamais, exposée à la perte de pouvoir d’achat.
  • Le pas vers l’investissement semble risqué. Les marchés et les investisseurs sont nerveux, et de nombreux marchés sont en perte.

Directives de décision : que pouvez-vous faire en tant qu’épargnant/investisseur ?

Tout cela complique la prise de décision, notamment à cause d’une situation géopolitique sans précédent qui peut évoluer dans de nombreuses directions. Quelques règles de base cependant :

  • Les portefeuilles d’investissement sont régulièrement touchés par les crises et l’incertitude géopolitiques. Celles-ci peuvent entraîner de fortes baisses à court terme (comme cela a été le cas), mais laissent rarement des traces profondes à long terme (les crises qui conduisent à une profonde récession, comme la crise pétrole dans les années 70, sont une exception). L’histoire ne se répète jamais exactement de la même façon, mais le modèle historique est rassurant.
  • Nous insistons donc sur l’importance d’un horizon de placement suffisamment long. Chaque investisseur connaît inévitablement des périodes de volatilité et de diminution des cours. Et durant ces périodes, il est important de garder ses objectifs à long terme à l’esprit.
  • L’espoir de prévoir le timing du marché et de ‘sortir temporairement’ jusqu’à ce que le risque soit écarté est illusoire. Personne ne peut prévoir le timing du marché. Sans oublier ceci : décider de sortir du marché, c’est la partie la plus facile. Ce qui est en revanche beaucoup plus compliqué, et plus déterminant pour le rendement à long terme, c’est de savoir quand y retourner. En entrant trop tard, on passe souvent à côté d’une bonne partie du rendement. En général, il vaut donc mieux maintenir son investissement jusqu’au bout.
  • En plus d’une durée suffisamment longue, il faut aussi une vaste répartition : en actions, obligations, liquidités et autres formes d’investissement. Dans certaines solutions d’investissement (les fonds dits diversifiés), cette répartition est “intégrée”. Des gestionnaires professionnels font des ajustements permanents en fonction des conditions du marché. Il est important de conserver une exposition aux obligations, même si leur potentiel de rendement est limité. Car elles limitent le risque du portefeuille. Les actions aussi restent importantes, parce qu’elles préservent le potentiel de rendement à long terme, même si elles sont actuellement très volatiles.
  • Cette volatilité (le degré de fluctuation des cours), vous pouvez l’utiliser à votre avantage en tant qu’investisseur, en étalant les moments d’entrée d’un investissement dans le temps. Pour en savoir plus sur l’importance d’un horizon de placement à long terme et sur la répartition d’un investissement dans le temps, cliquez ici.
  • On peut également être tenté de faire des ‘investissements de crise’ typiques, comme un achat d’or. L’histoire nous apprend que l’or se porte effectivement bien pendant les crises mais qu’il perd généralement de son éclat ensuite. L’or représente une petite partie de certaines solutions d’investissement diversifiées. De cette façon, il offre une certaine protection, sans hypothéquer le rendement à long terme du portefeuille.
  • Votre agent est là vous conseiller ! Vous avez des questions concernant vos investissements ou vous souhaitez actualiser votre portefeuille d’investissement ? Votre agent Crelan vous attend !

Disclaimer : Les informations contenues dans cette publication constituent un commentaire général sur la situation financière actuelle et ne doivent pas être considérées comme un conseil ou une recommandation concrète en matière de produits financiers.